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teleportation

IV. "Très loin de la surface."


Jour après jour avec leurs tenues de plongeurs,

habillés propre et sans sueur.

Frais du matin, le poil raz.


A retenir leur respiration,

des journées entières,

de leur vies vendues.


A arracher au sommeil,

les quelques heures,

où ils peuvent respirer.

A ne jamais sortir,

ils devraient finir,

par se transformer.


Mais à l'extérieur,

ils maintiennent coûte que coûte,

un semblant d'apparence humaine.


Qu'arriverait-t-il s'ils ne pouvaient plus être esclaves ?

Pourraient-t-ils supporter la liberté ?

Comment survivraient-t-ils dans un monde

où toutes les ressources sont volées par les propriétaires ?


Est-ce qu'ils prendraient les armes pour gagner leur droit de vivre ?


5 minutes de poésie,

écrite sans fard, parmi la foule des travailleurs et travailleuses entassés,

dans une rame du métro.


5 minutes de poésie,

au milieu des pas pressés des condamnés aux travaux forcés,

quelle horreur d'imaginer ce qui se passe dans leurs têtes mortes :


Ils ont renié leur droit à la vie.


Pour un marché de dupes, la vie sauve pour leurs proches,

en réalité consiste juste à les livrer à la même vie d'esclavage qu'eux.


Ils attendent placides leur peine quotidienne.


Car on leur a matraqué depuis la naissance, qu'il n'y a qu'un chemin,

la résignation :

à accepter l'esclavage comme seule solution !

à accepter la spoliation de toutes les ressources pour des intérêts privés !

à accepter le remplacement de toute forme de choix par les lois !

à accepter l'interdiction tacite de toute forme de vie non marchande !


Car on leur a expliqué que ce sont des maux nécessaires pour garantir le confort, la sécurité, la santé...

Tous ces remèdes à leur peur d'exister.

Alors ils répètent sagement leur leçon à qui veut l'entendre,

pour pouvoir aller plus loin, sur la route de la réussite,

pour pouvoir aller plus haut, écraser plus de leurs semblables :

Ce sont des maux nécessaires...


Alors que jour après jour, ils voient tout ce qu'ils furent se décomposer.

Alors que jour après jour, ils se voient changer en monstruosités.

Alors que jour après jour, ils réalisent à quel point on les a trompés.


Il est trop tard pour échapper au rail, à la corde, au couteau, au remède, à la flamme de la révélation.


Ils pleurent sur leurs vies ruinées de ne s'être pas soulevés, de n'avoir pas secoué le joug,

incapable de réaliser leur erreur avant qu'il ne soit trop tard.


Il ne leur reste que la lâcheté de mourir, plutôt que répandre les tripes de leurs patrons,

de leurs banquiers, de leurs politiciens...

la même lâcheté qui les aura poussé à tolérer les génocides nécessaires,

victimes de la psychiatrie, immigrés, marginaux,

ou quelque soit la cible dont le système retire le droit de vivre.

Il ne leur restera que la damnation héréditaire qui poursuit la race maudite des travailleurs.

Il ne leur restera qu'à acheter un ticket de loterie.


Il suffirait d'une seule personne :

Si c'était toi.


Est-ce que tu comprends ?


Toi.

Moi, je suis déjà levé hurlant dans la mécanique du système qui me broie.

Je n'attends que TOI.

Moi, je suis déjà flamboyant dans mon uniforme d'immolé.

Relève TOI.

Moi, je veux entendre ta VOIX


Cette haine qui coule dans ces vers c'est la tienne !

C'est le sang des opprimés.

Si c'était toi.


Si tu te levais,

si tu prenais conscience,

que si c'était toi qui te levait pour NOUS défendre, pour défendre le droit de vivre libre,

le monde commencerait enfin à se libérer de ses chaînes.


Je ne serais pas mort pour rien.